Interview de Patrick Rault

Par Ludovic Mauchien Il a vécu à Tokyo, Okinawa, Londres et bien sûr en France. Il a visité plus de 40 pays. Ils parlent trois langues, en plus de celle du Karaté. Patrick Rault est un globe-trotter des Arts Martiaux.En 1985, il fut le premier Européen à aller vivre sur l’Île d’Okinawa. En tout, il restera 15 ans au Japon puis séjournera plusieurs années en Angleterre, avant de rentrer au bercail fin 2007.Si quelqu’un peut décrire l’âme du Karaté d’Okinawa, c’est bien lui. Entre poésie et efficacité, invisible et visible, Patrick Rault nous offre une photographie du Karaté des origines.
 
 
Aujourd’hui, prendre l’avion et parcourir la planète est presque devenu un acte ordinaire. Dans les années 80, même si les réacteurs avaient remplacé les hélices depuis belle lurette, il n’était encore pas si commun de partir au bout du monde. Il fallait de l’audace, du courage, et surtout de la passion.
 
Patrick Rault commence le Karaté en 1975, à Versailles, avec Guy Juille. « Du style Shito-ryu », précise l’intéressé. « Lors d’un stage au Dojo, j’ai découvert le Shorin-ryu grâce à maître Chinen. » Dix ans après ses débuts, à 25 ans, il décide d’aller au bout des choses, d’aller creuser pour découvrir les racines de son art, de comprendre l’invisible, ce qui se cache derrière la technique.
 
 
En 1985, il part donc au Japon. Il vit plusieurs années à Okinawa avant de s’installer à Matsudo, dans la banlieue de Tokyo, où il ouvre son propre Dojo, fait rare pour un Occidental. En 2003, il quitte l’Orient pour Londres. Enseignant de Karaté et de Kobudo, photographe professionnel, Patrick Rault y demeure cinq ans avant de revenir en France, à Perpignan.
 
Il est aujourd’hui 6e dan de Karaté (Japon et FFKaraté), 2e dan de Kobudo, pratiquant de Judo, membre du comité départemental des Pyrénées-Orientales de la FFKaraté et représentant officiel de l’école Kyudokan, celle de son maître Higa Minoru, un 10e dan très respecté à Okinawa.
 
Le mieux à faire, avec les passionnés, c’est de les laisser s’exprimer, disserter, bref laisser libre cours à leur cœur et leur esprit. C’est ce que nous avons fait avec Patrick Rault qui, au-delà de l’aspect technique, révèle les qualités du maître d’Arts Martiaux : courtoisie, révérence, respect et humilité.
 
 Vous avez créé votre propre école, le Bunbukan, en 2000. Pourquoi ?
 
Depuis mon arrivée à Okinawa en 1985, je travaillais avec le même maître, Nakamura Yoshio. Avec lui, j’ai tout appris sur les bases du Shorin. Et, en 2000, il me dit : “l’histoire s’arrête là entre nous. Maintenant, tu dois faire ton chemin sans moi.” Ce fut un choc, un traumatisme ! Je ne comprenais pas. J’en ai parlé à mon maître de calligraphie, Tsuji Tamizo. Il pensait que c’était une chance pour moi et m’a encouragé à créer ma propre école. Il m’a redonné du courage et je l’ai écouté. J’ai créé l’école Bunbukan (la maison de la culture et de l’art martial), qui vient de la fameuse maxime “Bunburyodo”, la poursuite de la voie par la culture et l’art martial.
 
 Que retirez-vous de vos années passées à Okinawa ?
 
Cela a changé mon approche de la vie. Au bout de quelques semaines, je connaissais deux expressions qui m’ont énormément touché. “Itchaliba Chode”, à partir du moment où l’on se rencontre, on est frères. “Shimugurusan”, ressentir la douleur de l’autre, l’empathie. Elles ont influencé ma vie et ma pratique.
 
J’ai eu plusieurs Senseï et ils m’ont tous appris beaucoup de choses. Ce que j’ai vite compris, c’est qu’à Okinawa, vous apprenez plus en observant et en ressentant qu’en utilisant la parole. Dans les Dojo, poser une question semblait vraiment mal approprié. Il faut savoir qu’en japonais, les mots questionner et douter ont la même origine étymologique. On peut donc imaginer que douter de son maître n’était pas bienvenu. Votre premier Dojo fut celui de Matayoshi Shinpo, l’un des plus grands Senseï de Kobudo…
 
Oui, j’ai été pensionnaire (Uchi Deshi) pendant un an dans son Dojo. La première fois que j’ai rencontré Matayoshi, c’était sur un marché, devant un immeuble de plusieurs étages qui lui appartenait. Il m’a accueilli avec le sourire et m’a donné une pierre pour que je travaille le renforcement de mes mains !
 
Lorsque que j’ai pénétré son dojo, j’ai eu l’impression de rentrer dans un lieu rempli d’histoire, comme un musée, mais aussi un lieu de travail. C’était un mélange de chaleur et d’austérité. En parallèle, je pratiquais le Karaté avec Nakamura Yoshio, que Matayoshi Senseï m’avait présenté.
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