Les Samouraï sont encore en vie !

 
 
On nous a menti ! Les Samouraï n’ont pas disparu au cours du XIXe siècle en même temps que l’ère Edo. Ils existent toujours !
Et ils sont beaucoup plus présents qu’on ne le croît dans les Arts Martiaux, comme dans la vie quotidienne.
Ils continuent de régir la pratique, voire même de reprendre la main sur celle-ci. Leur esprit, dicté par le Bushido, et leur approche de l’entraînement planent sur l’Art Martial.
Sans parler de leurs sabres et armures, véritables chefs d’œuvre, qui continuent à exalter nos pupilles, notamment au Musée du Quai Branly, à Paris.
Le dernier d’entre eux est mort en 1878. Takamori Saigo, leader de la révolte de Satsuma, l’ultime combat des Samouraï – porté à l’écran en 2003 dans « Le Dernier Samouraï » avec Tom Cruise (2003) -, est le dernier à avoir porté l’estocade.
 
Déjà, onze ans auparavant, en 1867, quand le pouvoir est restitué à l’empereur, ils avaient perdu leurs privilèges. L’avènement de l’ère Meiji en 1868 et l’interdiction du port du sabre en 1876 (Haitorei) porteront un coup fatal à leur caste.
Fin de l’histoire ! Désormais, les Samouraï sont des dinosaures des Arts Martiaux, ayant appartenu à un monde disparu. C’est en tout cas vrai d’un pur point de vue politique et militaire.
Mais leur esprit, édicté dans le Code du Bushido, a survécu et s’est même propagé depuis. Etre Samouraï, c’était bien sûr maîtriser 18 Arts Martiaux et une quarantaine d’armes.
 
C’était surtout suivre des règles de vertus (honnêteté, loyauté, courage, bienveillance, droiture, sincérité, honneur), s’élever humainement. Tout autant que guerriers, les Samouraï étaient calligraphes, poètes, écrivains et même philosophes.
 
 Sectorisation martiale au XXe siècle
 
 
Cet esprit, on le retrouve dans l’approche de beaucoup, de Hiroshi Aosaka, 8e Dan en Shorinji Kempo, ou de Hiroo Mochizuki, 9e dan, fondateur du Yoseikan Budo et patriarche des Karatékas français. Outre enseigner en France, ils ont tous les deux un point commun : être les dignes représentants de plusieurs générations d’une famille de Samouraï.
Chacun avec sa méthode et avec sa personnalité, Aosaka et Mochizuki Senseï dispensent un savoir séculaire, avec l’esprit qui y est rattaché. Dans leur enseignement aussi, on distingue nettement l’héritage des Samouraï. Le Shorinji Kempo aborde différentes facettes du combat. Le Yoseikan Budo est tout aussi complet avec son travail avec armes (sabre notamment), pieds-poings, projections, lutte.
 
Après avoir vécu le XXe siècle, Hiroo Mochizuki a effectué un retour vers le futur en se projetant dans le passé vers l’avenir. Pourquoi ? Le XXe siècle a amené une sectorisation, une catégorisation de la pratique des Arts Martiaux. D’un côté la Boxe pieds-poings, d’un autre les armes, d’un autre encore la lutte. Une logique contraire à celle des Samouraï qui ne maîtrisaient pas qu’un seul aspect du combat, mais qui devaient, tout au contraire, aborder toutes les distances et moyens de vaincre. Les Samouraï sont de retour !
Mais sont-ils réellement partis ? Les Koryu japonaises (écoles traditionnelles) n’ont jamais cessé de dispenser le savoir des Samouraï. Elles l’ont parfois fait très discrètement, sinon secrètement, après la 2e guerre mondiale quand l’armée américaine dictait sa loi. Mais elles ont perduré, fidèlement, léguant divers Bujutsu.
 
 Kyudo, Iaïdo, Kendo…
 
 
Le Kyudo en est un. Il y a bien longtemps qu’il n’est plus utilisé pour tuer un ennemi. Il n’en a pas pour autant perdu son essence. L’art du tir à l’arc est aujourd’hui pratiqué comme une méthode de développement physique, moral et spirituel. Les tireurs recherchent l’harmonie entre le corps et l’esprit, en quête de l’accord parfait, du mouvement juste et précis.
 
L’objectif est identique dans les écoles de sabre, que ce soit en Iaïdo ou en Kenjutsu. Beaucoup d’entre elles ont été créées par des Samouraï et ont conservé le savoir originel d’un Miyamoto Musashi (Hyoho Niten Ichi ryu), d’un Kamiizumi Nobutsuna (Shikage ryu) ou encore d’un Takeda Shingen (Takeda ryu), pour ne citer que quelques uns des plus célèbres. Le Kenjutsu et le Iaïdo n’ont pas perdu leur âme, loin s’en faut. L’art du Katana possède toujours sa noblesse.
 
Avant même l’ère Meiji (1868), une forme différente de la pratique commençait à poindre : le Kendo. Avec la fin officielle des Samouraï, l’art du sabre n’était plus exclusivement réservé aux seuls guerriers. Le Kendo se développa à vitesse grand V. Au début du XXe siècle, il fut même obligatoire à l’école et dans la police.
 
Il a certes évolué depuis mais les Kendoka restent parmi les plus fidèles héritiers des Samouraï. Le Katana est remplacé par un Shinaï (en bambou) mais l’esprit est identique : permettre au pratiquant de s’améliorer, de s’élever physiquement et mentalement.
 Se façonner une personnalité
 
 
La pratique du Kendo nécessite un engagement total et sincère du corps et de l’esprit. Le Kendoka porte ses attaques en libérant son physique et son mental. Le but n’est plus de tuer son adversaire, mais d’acquérir une plus grande confiance en soi avec un partenaire, de se façonner une personnalité pour la vie quotidienne.
Ces idées ne vous rappellent rien ? Un cours ? Un stage ? Un discours ? Car, n’est-ce pas l’essence de toute pratique, quelle que soit la couleur du Dogi ou du short (etc) ? La pratique ultime d’un Art Martial tel que l’entendaient les Samouraï, dépassait largement les seuls aspects technique et physique. Ils recherchaient certes l’efficacité maximale pour des raisons de survie et ne se comportaient pas forcément toujours comme des poètes. C’était avant tout des hommes de guerre. Mais ils suivaient des vertus fondamentales contenus dans leur code, le Bushido.
 
Et ces règles de conduite leur ont permis et appris à vivre en groupe. La société japonaise est toujours fortement imprégnée de cette culture Samouraï, du Bushido, dans son organisation hiérarchique et dans son fonctionnement.
 
Exemple : Un Samouraï pouvait juger instantanément de la compétence d’un adversaire en observant son attitude. De nos jours, lors d’un entretien d’embauche, quelque ce soit le CV ou les compétences, les entreprises japonaises n’embaucheront le candidat s’il n’a pas le « Kokoro Gamae », la bonne attitude mentale, indispensable pour tout apprentissage. Idem pour une promotion. En clair, Il faut être « à l’écoute, humble, poli, respectueux, coopératif, diligent et déterminé mais pas directement agressif ».
 La vraie force, c’est le groupe
 
 
L’excellence repose sur une bonne coordination. L’entreprise y veille en formant son personnel afin qu’il le maîtrise. Elle lui offre un cadre dans lequel il peut déployer toute son énergie. De même, l’humilité est une vertu cardinale de la société japonaise, véhiculée par l’éducation : s’excuser sans cesse, même si lorsque l’on n’est pas en tort, montrer que l’on accepte d’effacer son individualité pour être en harmonie avec la société.
 
En fait, dans la vision japonaise, ce qui fait la vraie force, c’est le groupe, qui tire sa puissance de sa cohésion. Il faut faire corps pour gagner en force. L’influence martiale est visiblement perceptible dans l’organisation des entreprises japonaises. « Honnêteté, loyauté, courage, bienveillance, droiture, sincérité, honneur », disaient les Samouraï. Et c’est ce que nous enseignent tous les Arts Martiaux.
Sources du dossier : Arte, Historia, Wikipedia, musée du Quai Branly, l’Encyclopédie des Arts Martiaux, Karaté Bushido.
 
Dossier réalisé par Ludovic Mauchien
 
Retrouvez la suite de cet article dans le numéro 393

Un commentaire sur “Les Samouraï sont encore en vie !

  1. Roy says:

    Bonjour, votre article m’intéresse. Je pratique le judo et le ju-jitsu depuis 2013. J’ai 59 ans.
    J’y retrouve ce que enoncez : pratiques exigeantes et passionantes d’un art martial, et surtout les vertus du code moral de jigoro kano.
    Les deux m’ont aidé et continuent de m’aider dans ma vie de tous les jours.

    J’ai hâte de lire la suite dans le numéro 393.

    Merci à vous

    Je dois remercier aussi mon fils qui m’a montré la voie du dojo, et plutôt la voie de la souplesse.

    Pierre

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